Inquisition espagnole

Chronologie de l'Inquisition espagnole

L'Inquisition espagnole s'est étendue sur près de 400 ans, il est donc préférable d'avoir une vue d'ensemble des événements clés pour comprendre ses effets sur l'Espagne et à travers le monde. L'Inquisition espagnole s'est transformée au fil des ans, concentrant d'abord ses efforts sur les conversos (convertis juifs), puis sur les morisques (convertis musulmans), et plus tard sur les protestants.

Historique de l'Inquisition espagnole

Si l'Inquisition espagnole est sans doute la forme la plus célèbre de persécution religieuse en Europe, elle n'était pas la première du genre. Pour comprendre l'Inquisition espagnole, nous devons examiner son prédécesseur ainsi que d'autres inquisitions en Europe.

Fig. 1 -

21 mai 1558. Procession d'une trentaine de protestants condamnés à mort par l'Inquisition espagnole.

L'Inquisition médiévale

Au XIIe siècle, l'Église catholique romaine développe l'Inquisition pour lutter contre l'hérésie, notamment au sein de la communauté chrétienne. Des pays comme la France et l'Italie ont utilisé les inquisitions pour se concentrer sur l'éradication des mouvements qu'ils considéraient comme hérétiques par rapport au catholicisme romain, tels que le catharisme et les vaudois.

Ces deux mouvements étaient chrétiens mais divergeaient des enseignements de l'Église catholique romaine, et étaient donc considérés comme hérétiques. À cette époque, le pouvoir de la monarchie s'accroît considérablement et, dans toute l'Europe, ces inquisitions sont considérées comme un outil utile pour contrôler la religion dans leurs royaumes et consolider le pouvoir.

L'Inquisition médiévale a joué un rôle considérable en Espagne aux XIIe et XIIIe siècles, mais elle a perdu de sa force au fil des ans, les monarques catholiques se concentrant sur la Reconquista.

Les raisons qui ont conduit à la création de l'Inquisition espagnole.

S'il existait déjà une Inquisition médiévale, pourquoi l'Espagne a-t-elle créé la sienne ? Et pourquoi était-elle si tristement célèbre ? Pour comprendre ses origines, il faut se pencher sur la population de la péninsule ibérique, sur l'évolution du rôle de la monarchie et sur l'approche de l'Espagne à l'égard des non-catholiques du royaume.

Convivencia

La péninsule ibérique abritait des populations chrétiennes, juives et islamiques qui vivaient dans ce que l'historien Americo Castro a appelé la convivencia ou coexistence, affirmant qu'elles vivaient dans une paix relative. Bien que les historiens continuent à débattre de l'existence réelle de cette convivencia, il est vrai que les hostilités se sont multipliées tout au long de la période médiévale. Les chrétiens ont combattu les musulmans (Maures) pour tenter de reconquérir d'anciens territoires, et la population juive de la péninsule a dû faire face à une augmentation des persécutions, de la violence et des meurtres.

Pendant la période médiévale, l'antisémitisme sévissait dans toute l'Europe et des pays comme l'Angleterre et la France ont expulsé leurs populations juives en 1290 et 1306, respectivement. En revanche, la population juive de la péninsule ibérique est restée la plus importante d'Europe et de nombreux juifs ont occupé des postes notables. L'historien Henry C. Lee décrit les Juifs comme jouissant d'un grand "pouvoir dans les cours des rois, des prélats et des nobles, en Castille et en Aragon".¹

Les conversos

À la fin des années 1300, cependant, la péninsule ibérique a connu l'un des pires antisémitismes d'Europe. Henri III de Castille et Léon (1390-1406) monte sur le trône et commence à forcer les juifs à se convertir au christianisme en leur proposant le baptême ou la mort. Lors du pogrom de 1391, des foules antisémites inondent les rues d'Espagne et commettent des violences contre les Juifs. Le pogrom a commencé avec l'agitation du clerc espagnol Ferrand Martinez à Séville et s'est rapidement répandu dans toute l'Espagne. Les populations juives de Castille, d'Aragon et de Valence ont été attaquées, leurs maisons détruites et beaucoup ont été assassinées. Craignant pour leur vie, des milliers d'entre eux acceptèrent de se convertir au christianisme ou tentèrent de fuir le pays. Le pogrom a été l'une des plus grandes attaques contre les juifs au cours du Moyen Âge.

Le pogrom a créé une importante population de juifs qui s'étaient convertis au christianisme, connus sous le nom de conversos (convertis). Malgré leur décision, ils étaient toujours confrontés à la suspicion et à la persécution. Parmi les conversos, il y avait probablement un certain nombre de personnes qui continuaient à pratiquer leur foi en secret.

Cependant, il est important de se rappeler que l'ampleur de ce phénomène a pu être exagérée par la propagande antisémite de l'époque. Connus sous le nom insultant de marranos (le mot espagnol pour cochons), ils étaient considérés comme une menace pour l'Église catholique et l'ordre social et ont été dénoncés comme un danger pour l'Espagne chrétienne après le mariage de Ferdinand et d'Isabelle (les monarques catholiques).

Fig. 2 - Massacre de Juifs à Barcelone pendant les émeutes antijuives de 1391

Les monarques catholiques : la religion

Les monarques catholiques, la reine Isabelle Ire de Castille et Ferdinand II d'Aragon, ont été des personnages clés de l'Inquisition espagnole. Bien que le système leur ait longtemps survécu, ils l'ont mis en place et sont associés à la ferveur religieuse qui a conduit à leur mission de type croisade contre l'hérésie.

Isabelle et Ferdinand se marient en 1469 et Isabelle est couronnée reine en 1474. Elle était pieuse (dévotement religieuse) dans ses croyances, ce qui lui a valu, ainsi qu'à Ferdinand, d'être nommés les monarques catholiques. Soucieux de l'unité religieuse, en 1478, les Rois Catholiques s'entretiennent avec le Pape Sixte IV de la menace que représentent les non-convertis et celui-ci émet bientôt une bulle papale. Celle-ci leur permet de choisir des inquisiteurs pour enquêter sur les questions religieuses, en commençant par Séville. Un an plus tard, en 1483, la Castille, l'Aragon, Valence et la Catalogne sont placés sous le pouvoir de l'inquisition.

Les monarques catholiques : le pouvoir

Lorsque Isabelle et Ferdinand sont montés sur le trône, l'Espagne était divisée (différents royaumes étaient gérés indépendamment) et la situation financière était instable. Isabelle avait surmonté la guerre de succession en 1474 pour devenir reine, mais il était clair qu'elle devait s'imposer comme un leader autoritaire pour contrer tout mouvement futur contre elle. L'Inquisition espagnole a non seulement contrôlé la religion dans toute l'Espagne, mais elle a également permis aux monarques catholiques d'affirmer leur domination sur des régions autrefois gérées de façon indépendante.

Qu'est-ce que l'Inquisition espagnole ?

Il est clair que l'Inquisition espagnole a été créée pour tenter d'éradiquer les hérétiques et d'établir l'uniformité chrétienne, mais qu'est-ce que l'Inquisition espagnole et comment fonctionnait-elle ?

L'Inquisition espagnole était une institution judiciaire (un système de tribunaux) établie pour juger toute personne soupçonnée d'hérésie (les suspects étaient souvent informés par leurs voisins ou même leurs amis et leur famille). Elle se composait d'un inquisiteur général et d'un conseil de la suprema. Six membres du Conseil se réunissaient avec l'inquisiteur général tous les matins pour discuter des hérésies liées à la foi et trois après-midi par semaine pour discuter des délits mineurs tels que la bigamie.

Quatorze tribunaux alimentaient la Suprema, et chacun d'entre eux comptait deux inquisiteurs et un procureur. L'un des inquisiteurs, connu sous le nom d'alguacil, était responsable de l'emprisonnement ou de la torture de l'accusé. Lorsque l'Inquisition espagnole arrivait dans différentes régions, les gens recevaient un édit de grâce de 30 à 40 jours pour confesser leurs hérésies. Le fait de le faire dans ce délai permettait d'alléger leur peine.

La torture et l'Inquisition espagnole

Les inquisiteurs utilisaient des méthodes de torture pour obtenir des aveux, notamment le chevalet ou le fait de suspendre quelqu'un au plafond par les poignets. Les accusés étaient souvent jugés lors de cérémonies appelées autos-da-fé (expression de la foi en portugais). Ces cérémonies étaient grandioses, conçues pour être regardées et pour envoyer un message.

Les condamnés recevaient différentes peines, allant de la confiscation des biens ou de l'emprisonnement à la condamnation à mort et au bûcher. La corruption était omniprésente dans l'Inquisition, car les inquisiteurs pouvaient tirer profit de la confiscation des biens. Les accusés ne bénéficiaient pas d'un procès équitable.

Fig. 4 - Illustration montrant la torture pendant l'Inquisition espagnole

Les effets de l'Inquisition espagnole

L'Inquisition espagnole a eu des effets durables, non seulement pour l'Espagne, mais aussi dans le monde entier. Elle a ciblé les populations juives, musulmanes et protestantes, ainsi que les communautés indigènes des Amériques. Cela a eu des conséquences horribles pour ces communautés et a favorisé le ressentiment et la dissidence qui se sont transformés en soulèvements.

L'Inquisition espagnole chez nous

En Espagne, l'Inquisition a permis à la monarchie d'accroître considérablement son pouvoir et a contribué à rendre l'Espagne plus homogène. Le protestantisme a été rapidement éliminé du pays, alors que d'autres pays se sont engagés dans de longs conflits religieux. L'Espagne est ainsi restée largement exempte de conflits, à l'exception de quelques soulèvements, bien que l'Inquisition se soit impliquée dans des conflits religieux ailleurs. On attribue également à l'Inquisition le mérite d'avoir empêché les procès en sorcellerie qui ont touché des pays comme l'Angleterre entre le quinzième et le dix-huitième siècle.

Effets économiques

D'un point de vue financier, l'Inquisition espagnole a eu moins d'effets clairs selon l'historien Henry Kamen.² Alors que la couronne et les inquisiteurs ont bénéficié des confiscations de biens et de l'imposition d'amendes, les expulsions de musulmans et de juifs ont laissé l'Espagne avec un déficit de main-d'œuvre qualifiée, ce qui a eu des effets négatifs sur l'économie.

L'Inquisition espagnole dans les Amériques

L'Inquisition espagnole s'est étendue aux Amériques, où les communautés indigènes ont été contraintes de se convertir au catholicisme sous peine d'en subir les conséquences. Ces communautés avaient leur propre culture et leur propre religion. Les colons ont également été la cible de l'Inquisition espagnole.

La guerre de quatre-vingts ans et l'indépendance des Pays-Bas

Le recours à l'Inquisition par le roi Philippe II pour réprimer le protestantisme aux Pays-Bas a provoqué des dissensions et de la colère face à l'ingérence de l'Espagne dans les affaires intérieures. Les révoltes provoquées par le traitement sévère des protestants ont conduit à un mouvement de résistance, qui s'est transformé en guerre de quatre-vingts ans, luttant pour l'indépendance des Pays-Bas. Les rebelles ont fini par obtenir gain de cause, ce qui a entraîné l'indépendance des Pays-Bas vis-à-vis de l'Espagne en 1648.

Dans le cadre d'un examen, tu pourrais avoir une question comme celle-ci : Dans quelle mesure l'Inquisition espagnole a-t-elle été établie à des fins religieuses ?

Pour répondre à cette question, tu dois tenir compte des motivations religieuses des monarques catholiques, mais aussi de toutes les autres raisons pour lesquelles l'Inquisition a pu leur être bénéfique. Tu concluras ensuite sur ce que tu penses être leurs motivations. Tu peux aussi réfléchir à la façon dont l'Inquisition espagnole s'est transformée tout au long de sa mise en œuvre et si cela a eu une incidence sur ses objectifs. Voici quelques arguments que tu pourrais inclure :

1. Henry C. Lee, Une histoire de l'Inquisition espagnole, volume 1, 2017.

2. Henry Kamen, "Les confiscations dans l'économie de l'Inquisition espagnole", The Economic History Review, 1965.